Une histoire complète : description

Les quatre dernières séances de cours seront l’occasion de travailler sur un même récit, repris et augmenté par des concepts que nous introduirons chaque semaine avec exemples et réflexions.

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Un récit, même le plus déconstruit, raconte quelque chose, c’est-à-dire comporte un ensemble d’éléments qui permettent au récepteur de comprendre des intentions. Selon le type de récit, ces intentions seront explicites ou implicites, cachées ou revendiquées. Même s’il y a toujours une part inconsciente dans les valeurs et le "message" portés par un récit - et que le récepteur associe le récit à son propre contexte - il nous semble important qu’un auteur.rice se pose la question, en cours d’écriture, des enjeux et thématiques développés dans son récit.
Dans le cadre de ce cours, nous faisons le pari que démarrer au hasard permet d’éviter le piège du grand questionnement communément appelé "page blanche" (la page n’a évidemment jamais été blanche). Nous savons que d’aussi loin de soi qu’on parte, il y aura toujours des patterns, des idées récurrentes, des sursauts cachés qui vous appartiennent et qui ne se découvrent que par le travail, les essais et erreurs et la joie du saut dans le vide. Pariez donc avec nous.

Les quatre séances qui clôturent ce premier quadrimestre sont chacune l’occasion d’aborder des concepts liés à la dramaturgie : structure concentrée, préparation et exploitation, ironie dramatique et personnage en crise. Vous travaillerez seuls. Il peut être envisagé de travailler en groupe, mais ceci se négocie : il s’agit pour nous de mesurer comment chacun s’investit personnellement dans un projet.

La structure concentrée
L’outil utilisé pour démarrer cette série d’exercice et la structure concentrée. Par concentrée nous voulons dire canonique, classique, archétypale. C’est celle en trois actes conceptualisée par Aristote, critiquée depuis mais toujours active dans de nombreux récits. Nous la malmènerons plus tard, pour le moment appuyons-nous sur elle.

La préparation et l’exploitation
Ces deux concepts liés ont déjà été de nombreuses fois cités, nous allons les mettre au travail de manière structurée pour faire avancer le récit dans la deuxième séance, en faisant retour sur l’écriture.

Ironie dramatique
Lié à l’économie de l’information qui traverse les récits, l’ironie dramatique  Ironie dramatique
Donner au récepteur une information que n’a pas un, plusieurs ou tous les protagonistes d’un récit. Le film catastrophe base sa mise en place tout en suspense par ce genre de truchement : un barrage se fend dans ses profondeurs, et nous assistons au réveil routinier du village en contrebas, la discussion sempiternelle entre la veille femme angoissée qui craint l’édifice depuis toujours et le débonnaire, aveuglément confiant dans la parole des experts, qui l’infantilise.
L’ironie dramatique se termine généralement par une scène de révélation où les protagonistes reçoivent l’information. Cette information peut produire une grande variété d’effets sur les protagonistes et par ricochet sur le récepteur. Une révélation sans conséquences peut être vécue comme un défaut d’exploitation, et donc être frustrante, tout comme l’absence de révélation. Ces deux défauts peuvent être intentionnel, mais ils sont souvent le signe d’un défaut d’écriture.
Dans sa version rapide, l’ironie dramatique peut se jouer en un seule scène : le protagoniste fait face à dix brutes menaçantes qui, au moment d’attaquer, s’immobilisent soudain, puis fuient à toutes jambes. Nous découvrons que derrière le protagoniste se tient un monstre puissant, mais le protagoniste, qui n’a pas encore cette information, sourit d’aise, un peu étonné ou franchement satisfait, suivant le degré de comédie.
Voir aussi suspense et quiproquo.
permet un spectre large d’émotions puissantes chez le récepteur du récit. Nous mettrons l’accent sur sa mécanique lors de la troisième séance de travail.

Personnage en crise
Un personnage en crise perd son lien à l’objectif. Il met en suspens le récit et menace toute la mécanique même de la dramaturgie. C’est l’occasion de faire émerger des émotions plus ténues, de laisser s’engouffrer une mise en doute de la trajectoire d’un récit, et de reformuler un objectif parfois antagonique à celui qui a été jusque-là annoncé.

Travail rendu

Ce travail en quatre séances nous permettra d’obtenir un squelette d’histoire, et quelques objets plastiques épars : planches, illustrations, plans, photographie. Notre intention est principalement de vous amener à structurer un récit, mais le medium dans lequel il pourrait se déployer n’est pas neutre : on ne pense de la même manière quand on est illustrateur, photographe, animateur ou vidéaste. Nous susciterons donc en cours de travail des essais plastiques qui permettront de donner corps à vos intuitions.
La remise du 15 décembre sera donc un dossier avec un récit, et divers essais - forcément embryonnaires - qui nous permettront de percevoir l’univers narratif et la matière par laquelle il se déploie.

Travail en classe, travail hors classe

La pression de l’école sur votre temps hors classe va grandir dans ce dernier mois de cours. Aussi, nous veillerons en tant que professeurs à doser le travail que demande la tenue de cet exercice en quatre parties. Nous vous demandons d’être présents et alertes lors des cours pour des raisons pédagogiques mais aussi pour que le plus clair du travail puisse se faire durant ces séances précieuses. Si c’est le cas, le travail hors classe sera plus limité. Soyez donc là de corps et d’esprit.