Structure et ligne thématique

Par Structure on désigne l’ensemble de "ce qui arrive" aux personnages à l’intérieur d’une histoire : événements, péripéties, situations, anecdotes. Elle est considérée comme dramatique (il faudrait dire dramaturgique) quand elle fait agir et réagir les personnages.
Le thème est "ce que travaille" le récit, ce qu’il met en jeu en terme de valeur dans le récit.
Structure et thème se conjuguent dans un récit bien ficelé pour nous malmener émotionnellement et mettre à l’épreuve notre vision du monde. Il est donc essentiel d’identifer ce coeur puissant des récits.

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Structure dramatique

La structure se construit donc sur une préoccupation presque unique : la chaîne plus ou moins ferme des causes et des effets qui s’applique aux personnages. Est donc pertinent, fondateur, dans une structure dramatique ce qui génère de la cause et produit de l’effet.
Nous appellerons structure dramatique concentrée, ce modèle lorsqu’il est appliqué de façon académique, à savoir systématique et continu. Elle sera, au contraire, diffuse lorsqu’on n’y retrouvera pas l’ensemble de ses articulations fondamentales, ou qu’il s’y opèrera des discontinuités, des aberrations ou des "pauses" dramatiques.

Thème, thématique, question dramatique
Lorsqu’on dit qu’un récit raconte "quelque chose", on fait généralement référence au contenu explicite, que l’on peut résumer en quelques phrases, par exemple "Une petite fille reçoit la mission d’apporter un panier de nourriture à sa grand-mère et rencontre en chemin un loup qui complote pour la manger en se faisant passer pour la grand-mère". Mais la plupart du temps, nous identifions derrière ce pitch quelque chose de plus abstrait, de plus profond. On parle alors de thème, de thématique, de ligne thématique, de question dramatique. Il n’y a pas vraiment de consensus sur la question. Il n’y a pas non plus de consensus sur la nécessité que ce thème soit conscient ou inconscient chez les auteurices ou chez les spectateurices. Il se peut aussi que le thème lui-même soit sujet à controverses. Le petit chaperon rouge est-il un récit qui conseille aux enfants de ne pas s’écarter du chemin tracé par les adultes ou un récit sur les dangers que fait peser la violence patriarcale sur les filles ? Le cas des contes est particulièrement compliqué à trancher, puisqu’il n’a pas qu’un seul auteur et aucune réelle version "officielle".
Cependant, si une histoire peut avoir plusieurs interprétations, on ne peut pas lui faire tout dire : Le petit chaperon rouge nous avertit des conséquences lourdes de la naïveté, particulièrement dans ses versions anciennes qui se terminent sans happy-end.

A quoi sert un thème ?

Dans la pratique de l’écriture d’un récit, se demander quel est la ligne thématique d’un récit permet d’évaluer la cohérence des conflits qui y sont traités, de clarifier la position des opposants et des adjuvants, et de rendre plus signifiantes la direction du récit.
Le cas typique est celle des adjuvants et opposants : quelle sont leurs motivations ? La réponse peut être trouvée dans le thème, ils peuvent représenter des variantes de l’objectif du protagoniste. Si le héros de votre histoire veut le triomphe de la justice par le pouvoir de l’alliance des faibles, il peut trouver face à lui des opposants qui désirent le triomphe de la force, de l’argent, et par la division, au-delà du simple refus de voir le héros échouer. Ceci peut guider le type de conflit par lequel passe le récit, les dialogues et les moyens que protagonistes et antagonistes se donnent, et les paroles que vous mettrez dans leur bouche.
On peut démarrer un récit sur une intuition et sans savoir exactement les valeurs qu’il engage, mais dans le cadre de cet exercice, nous ferons exactement l’inverse : le thème précédera le récit.

Déroulé de l’exercice

Le but est d’écrire un récit court sous forme d’un conte.
Formez une équipe de deux ou trois et recevez un thème tiré au hasard (un générateur se trouve ici).

Piocher six images images dans le magma disponible en classe.
L’une d’elle sera lae protagoniste. Pour les autres, soyez large dans le spectre : situation, paysage, objet, personne ou personnes.

Dessinez une structure sur une feuille A3 et trouvez sélectionnez une image qui sera l’objectif matériel de votre futur protagoniste, et 3 images qui seront des conflits, que vous disposez dans la zone de la progression dramatique. Vous êtes prêts à commencer.

Définissez votre protagoniste. Qui est-il ? Il est lié à la ligne thématique : il va être transformé par les épreuves, il est peut-être aux antipodes de cette ligne, ou ne s’est jamais donné les moyens de sa réalisation.
Qu’est-ce qui va le précipiter dans les événements ? Un incident déclencheur.
Quel objectif lui est donné ? Un destinateur, lors de la scène de plot.
Laissez circuler les idées, en se référant à la ligne et aux images piochées. La fantaisie est évidemment la bienvenue.
Placez une des images sur le point du climax, et une sur le plot 2.

De là, identifiez les conflits et demandez vous comment ils se positionnent par rapport à cette ligne thématique. En quoi ils peuvent faire dévier le protagoniste de son objectif, mais surtout de la ligne thématique ? Le protagoniste peut progresser vers son objectif tout en s’éloignant de la ligne thématique : si la justice par le triomphe de la démocratie est son thème et qu’il obtient seul et par la force un succès momentané, par exemple, il contrevient au thème alors qu’il semble s’en rapprocher.
Le climax doit dans cette logique être le point de bascule du récit, qui aligne thème et objectif et portera une forme de morale de votre récit.
Un élément au moins se retrouve dans les trois mouvements du récit (exposition, progression, résolution), sous la forme de décor, de protagoniste, de pensée, au choix.

Rendu

Écrivez le récit sous la forme d’un conte, ce qui ne veut pas dire simplifiée, mais en préparant les effets possibles à l’oral. Illustrez les scènes clés du récit.

Lecture en classe

Ces récits seront racontés comme tout bon conte, en classe par petits paquets à partir du 29 novembre. Des images peuvent accompagner la lecture, montrées ou projetées. Une liste de passage sera établie pour que chaque groupe puisse raconter son conte en début d’atelier.

Durée de l’exercice

Deux séances, et restitution sous forme orale.