Narration/sensation

Si les outils de la dramaturgie permettent d’affermir le squelette d’un récit, raconter est une affaire de chair. Au delà du sujet d’un récit, nous sommes affectés par les sensations qu’un récit convoie.

Le dernier exercice de ce premier quadrimestre se penchera sur les sensations et leur relation à la structure dramatique. Il se déroulera en trois séances et plusieurs étapes pour vous guider dans l’élaboration d’un récit équilibré entre sensation et narration.
Cet exercice sera pour une fois mené individuellement.

Déroulé de l’exercice

Premier cours
Un premier exercice d’écriture permettra de se mettre en route. Il s’agit d’un exercice court (10 minutes), centré sur la description de sensations et d’observations.
L’écriture est pour beaucoup un médium intimidant, ce premier exercice est un moyen de dépasser ce premier écueil.

Sur base d’une image fournie à chacun, un deuxième exercice d’écriture sera réalisé, sur un temps plus long. Il a pour but d’associer à son contenu - assez abstrait - des sensations, impressions et activités. La forme sera probablement décousue mais la cohérence est secondaire par rapport à la précision et la justesse de l’écriture.
Quelques textes sont lus et discuté en classe pour faire retour sur l’expérience et ses résultats.

L’après-midi sera consacrée à la mise en forme de ce matériau brut.
Il s’agira de dégager de ce texte une trajectoire, une transformation, une évolution, une irruption, bref de structurer une temporalité.
Trouver cette structure passera par un aller retour entre écriture (texte, schéma, etc.) et matière : dessin, photo, vidéo, son, etc. En fin de journée, il est important d’avoir de la matière sensorielle et pas uniquement des idées.

Deuxième cours
Il s’agira durant ces deux séances de donner corps à votre récit.
Notre attention se portera sur les concepts de préparation et d’exploitation, un concept de dramaturgie.
La préparation consiste à injecter un élément dans la chaîne du récit, de lui associer une signification, ou encore une valeur affective. En le faisant réapparaitre ensuite dans le récit, on peut produire un spectre assez large d’effets dans la suite du récit. On parle donc de préparation ET d’exploitation, l’un ne pouvant être dissocié de l’autre. Un article sur ce site décrit plus complètement sa mécanique.

La préparation et l’exploitation sont bel et bien parties d’une mécanique, qui peuvent nous impacter à notre corps défendant. Un désir de vengeance puissant peut nous prendre au tripes alors que nous croyons à la tempérance de la justice, ou la reconnaissance de nos pairs peut devenir un désir brulant alors que nous croyons privilégier l’analyse froide du jugement. La dramaturgie crée des affects, et nous les ressentons souvent même si nous ne sommes pas dupes ni de ses rouages, ni de l’idéologie qui les sous-tend.

Le récit qui vous est demandé passera donc par le réemploi d’éléments graphiques, textuels, sonores. Identifiez en un, et faites en une représentation dans un état correspondant au début du récit. Produisez ensuite une variation, un état transformé du ce même élément. En plaçant ces deux éléments à la suite, voyez que type d’action permet sa transformation. Une contrainte extérieure, intérieur, un conflit, ou au contraire, une aide ?
Le sens, qu’il soit identifiable ou diffus, se dégagera des transformations subtiles ou brutales des éléments qui la constitue, quel que soit les moyens plastiques employés.
Aidez-vous, à chaque étape, de dessin, d’écrit ou de toute forme utile, dans cet exercice on s’appuie sur des éléments plastiques et pas sur des idées.

Troisième cours
Ce troisième et dernier cours sera l’occasion de revenir sur l’ouverture et sur l’économie de moyen.

Exemples potentiels

L’année de la comète de Clément Vuillier
Homme étendu sur la pelouse de Eric Angenot
Gras de Félix Laurent
Des bâtisseurs de Yannis La Machia
Le store en Bambou de Jiro Taniguchi