Le transcript

Le transcript s’empare d’un film déjà réalisé, sa visibilité, son audibilité, pour en écrire le scénario, a posteriori. Il fait donc le chemin inverse de la production habituelle qui part de l’écriture du scénario pour s’accomplir dans le film. Si le scénario prépare le film, le transcript, en revanche, en reconstitue l’origine, le texte, le projet, en suivant des règles d’écriture proches.
Cet exercice porte l’attention sur l’acuité de l’observation et la précision de l’écriture, deux savoir-faire important pour tout dramaturge.

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Nous avons une habilité, comme tous ce qui vit, à percevoir notre environnement par les signes qu’il émet. Si c’est une des sources de notre émerveillement, c’est d’abord une qualité vitale : nous avons besoin de ces informations pour adapter notre conduite et nos actions, tout comme une plante oriente ses feuilles pour optimiser la photosynthèse ou attirer les pollinisateurs. La majeure partie de cette captation nous parvient cependant sous une forme synthétique et des sentiments diffus, de confort ou d’inconfort, de plaisir ou déplaisir, de tension et de relâchement.
Devenir auteurice, c’est passer de cette perception passive et intuitive à l’observation actives de ces signes, pour ensuite élaborer pour le récepteur des situations qui lui permettront d’accéder à la compréhension des situations et l’intériorité des protagonistes.

Revenir au percept

Passer d’une matière visuelle à l’écriture est une opération technique qui aiguise l’observation. Dans le cas de récit sous forme de film ou dessiné, il s’agit de plus de comprendre quel sont les signes choisis par les auteurices du récit pour nous communiquer informations, antériorité et intériorité de la situation que nous recevons.

Objectif

Confronter immédiatement l’écriture aux contraintes pratiques de la mise en images et en sons du récit : fuir la littérature et rendre les mots fonctionnels comme outils-à -faire-voir-et-entendre. Par delà cet aspect pratique, c’est aussi contre les moyens de la littérature que nous travaillons ici : son accès direct à l’intériorité ; son aisance à produire de la métaphore. Ce sont là 2 ennemis mortels de la dramaturgie, qui n’est qu’extériorité (ou extériorisation) et trivialité dans l’expression.

Contraintes

Un fragment de film est projeté plusieurs fois de suite. Après 4 ou 5 projections successives, chacun commence le transcript de la scène.
Épisodiquement, pendant cette phase d’écriture, le fragment est projeté à nouveau. A partir d’un certain moment, le son est diffusé avec les images pour être intégré au transcript, comme une couche qui le complète.

Le transcript doit respecter les 3 règles fondamentales suivantes :
1) Le découpage en scènes : chaque changement de lieu ou de temps donne lieu à un changement de scène.
2) La métrique scénaristique : une page de texte doit correspondre à une durée de 45 secondes à 1 minute de film.
3) L’écriture comportementale : tout ce qui est écrit doit être visible et audible, sans ambiguïté, sans besoin d’interprétation, sans intention psychologique ajoutée, avec la froideur de la captation des machines célibataires que sont la caméra et le micro. Pour éviter l’utilisation de la littérature et de la psychologie, il est utile de soumettre le texte à une double question : pour chaque chose écrite, se demander - A quoi ça se voit ? ("il attend", à quoi ça se voit ?) - A quoi ça s’entend ? ("il est nerveux" : à quoi ça s’entend ?).
4) Par ailleurs, l’exercice se concentre sur l’acuité de la perception et la précision dans le choix des mots et de leur formulation, l’ordre d’apparition des informations, et beaucoup moins sur le respect des règles canoniques de l’écriture de scénario. La notation des scènes (par ex. INT. CHAMBRE - NUIT) et la syntaxe des dialogues, les alinéas et autres interlignages ne sont pas impératifs ici.

Matériau fourni

L’exercice s’appuiera sur deux extraits de films.
Un premier extrait du film Le bon, la brute et le truand, de Sergio Leone, 1966 permettra un premier défrichage de la méthode d’écriture.
Un deuxième extrait, du film Romeo + Juliette, de Baz Luhrmann en 1996, sera transcrit en solo.

Matériau produit :

2 textes manuscrits d’une longueur de 1 à 2 pages chaque fois.

Durée de l’exécution de l’exercice :

Une demi-séance d’atelier